Travail forcé dans la région Rhin/Neckar - un projet de l'école intégrée de Mannheim (IGMH)

 


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Claude Humbert

 

 

 


Il habitait 1944 à Saint-Dié

   

Claude Humbert 

pendant une visite à Mannheim 2003

 

Déportation
Le 8 nous sommes réveillés tôt, des voitures équipées de radio sillonnent les rues" pour aller faire des travaux, tous les hommes de 16 à 45 ans doivent se rendre de suite, avec des vivres .à la caserne Chérin..... les réfractaires seront fusillés.. !"C’est l’effroi.. dans les rues il y a des soldats partout, impossible de fuir.. et ou ? on ne sait pas ou sont exactement les américains.?. comment franchir les lignes ? le piège est bien fermé et puis , il y a le risque des représailles.. alors , la mort dans l’ame des centaines d’hommes (900 !)  se rendent à la caserne Chérin, on y entre mais on en sort pas ! et on ne sait rien sur la suite… Je retrouve quelques visages connus dont Jean Joliez qui avait participé aux activités paroissiales ainsi qu’un professeur du collège que j’aimais bien Mr Hirtz, il avait été courageux au moment des incidents de 1936Au début de l’après midi on nous met en rangs et, encadrés de soldats, nous partons direction de Saales, la colonne s’étire, s’arrête de temps en autre et nous obliquons vers Lusse, nous y arrivons à la nuit qui tombe vite en novembre , on nous pousse dans un tissage dont les machines sont bien entendu arrêtées et sur lesquelles nous allons tant bien que mal nous installer car nous sommes plusieurs centaines dans une usine pas très grande..Et nous attendons, nous attendons, épuisés par la marche et l’inquiétude.. Et brusquement c’est la branle bas, les sentinelles nous poussent dehors au passage de la porte on nous donne une boule de pain allemand et de nouveau en route. La nuit est noire ,il tombe une petite pluie fine et nous arrivons à la gare, nous comprenons alors pour quoi " ils " nous ont amenés à Lusse..

   

Un train est rangé le long du quai, il est composé de wagons voyageurs mais anciens et en mauvais état, dans le compartiment ou je me retrouve avec Jean la vitre est cassée...Rien ne va très vite dans ces situations et nous attendons encore avant que le train démarre, cahin caha, nous montons vers Saales et descendons la vallée de la Bruche, le jour pointe quand nous arrivons à Strasbourg, le train ralentit mais ne s’arrête pas et nous franchissons le Rhin…..
Ou allons nous ? Nous traversons des gares que nous ne pouvons identifier et finalement vers le fin de la matinée nous arrivons dans une grande ville qui manifestement à reçu plusieurs fois la visite des bombardiers, wagons éventrés, voies retournées ,bâtiments en ruine, spectacle que nous n’avions pas encore vu jusque la d'une telle importance mais qui nous fait craindre le pire.. .. !Le train s’arrête au milieu de ce décor inquiétant. Nous sommes à Karlsruhe et nous allons attendre longtemps que le train reparte ce qui se fait enfin dans l’après midi. C’est ainsi, que quittant enfin Karlsruhe , nous arrivons tardivement à Mannheim ou dans un premier temps on nous loge des écoles ;le lendemain ce sera " la foire aux esclaves ", des employeurs divers de la grande usine métallurgique aux artisans boulangers ou couvreur….viendront chercher qui quelques centaines, qui deux ou trois hommes pour remplacer la main d’œuvre qui leur fait si cruellement défaut après la mobilisation des dernières réserves expédiés sur fronts de l’Est ou de l’Ouest et ou les pertes sont énormes.

 

Arrivée à Mannheim
C’est ainsi, que quittant enfin Karlsruhe , nous arrivons tardivement à Mannheim ou dans un premier temps on nous loge dans des écoles.
Le lendemain ce sera " la foire aux esclaves ".Des employeurs divers de la grande usine métallurgique aux artisans boulangers ou couvreur….viendront chercher qui quelques centaines, qui deux ou trois hommes pour remplacer la main d’œuvre qui leur fait si cruellement défaut après la mobilisation des dernières réserves expédiés sur fronts de l’Est ou de l’Ouest et ou les pertes sont énormes.

   

Dans la cour de ce bâtiment (le Marstall de Heidelberg) la foire aux esclaves était organisée

 

Les restes de l'usine MWM (Mannheimer Motorenwerk) à Ilvesheim. A l'environ de ces halles se trouvait  la barraque du campment.

 

   

Travail forcé à l'usine Motorenwerke à Ilvesheim

Je suis quant à moi envoyé, avec Jean Joliez et quelques autres à la" Motoren Werk" à Ilvesheim, grande banlieue de Mannheim. Nous y retrouvons des prisonniers de guerre Français et Russes et c’est avec deux de ceux çi que je vais " travailler."sur une fraiseuse ! Ce grand atelier fabrique des moteurs diesel monocylindre (la maison mère, elle construit des moteurs de sous marins.. !) Ma tache n’est pas très compliquée, je dois poser un vilebrequin sur la fraiseuse, le bloquer l’amener en face des couteaux qui sont pré-réglés, mettre en marche arrêter et recommencer. J’observe que mes deux " coéquipiers " sont très consciencieux et je vais avoir quelques soucis avec eux en étant extrêmement lent ou en mettant trop souvent la machine en panne...ce qui nécessite l’intervention du contremaître allemand en vérité pas très dynamique, mais qui redoute fort le chef d’atelier qui lui arbore l’uniforme jaune des gens du parti. Par la suite ,vu mon "incompétence et mon peu d’ardeur… " je serai affecté à des travaux divers.. ! à la grande satisfaction de mes coéquipier qui redoutaient mon " sabotage " !! 

 

La barraque et l'alimentation

Notre petit groupe est logé dans un bâtiment désaffecté, type baraquement, grande salle avec lits en bois superposés, équipés de paillasse rudimentaire et le minimum en matière sanitaire ! Il y a heureusement un poêle et nous disposons de charbon, il va de soi qu’en cet hiver la temperature n’est jamais excessive…

Notre camp est tout proche d’un petit restaurant, "le Krone"autrement dit la "couronne" dont le patron est réquisitionné pour nous nourrir grâce aux cartes d’alimentation que nous allons recevoir et éventuellement ‘utiliser directement en complément car nous allons aussi recevoir une solde…minime certes mais combien utile. Notre situation matérielle est donc vivable et sans comparaison avec celle des camps

   

Le restaurant "Krone" (Couronne), Ilvesheim

 

Les contacts avec les Allemands

Bien que surveillés nous avons une certaine liberté et pouvons dans la journée hors boulot sortir dans le village. Ce qui me permettra d’aller à l’église, voir à la messe et de rencontrer avec Jean le Curé, pas Nazi mais prudent.

L'eglise catholique à Ilvesheim


Le patron du Krone, un solide et plantureux germain, l’est un peu moins et après quelques temps d’observation, ne cachera pas à certains d’entre nous son peu d’estime pour Hitler et sa certitude de la proche défaite. Il aura pour nous une qualité énorme: écouter la radio de Londres et nous donner ainsi " sous le manteau " les nouvelles importantes.Pour la fin de l’année 44 je n’ai rien noté de particulier si ce n’est que pour Noël, le " Krone " qui décidément était un brave type nous fabriqua un repas qui se voulait de Fête, ce qui est quand même une grande tradition chez les Allemands.


Les relations entre les déportés

J’ai noté que le 31 Déc. Mannheim avait été bombardée, ce qui nous angoissait toujours car une bonne partie des Déodatiens y séjournait.

Et c’est bien notre problème, au début de notre captivité nous ne savons rien de ce que sont devenus les nôtres ce qui est angoissant, c’est seulement vers décembre que courra le bruit que St Dié a été brûlée ce qui renforcera notre inquiétude pratiquement jusqu’à notre libération. Nos familles ne sauront rien de nous et nous ne saurons rien d’elles.. !Il se crée vite des habitudes…le travail, de jour ou de nuit dure, les recherches pour se nourrir, se nettoyer, l’entretien du camp et…les alertes qui vont devenir de plus en plus oppressantes. Les discussions avec les uns et les autres sur le présent et le devenir ? Dans l’ensemble le climat est assez tendu, comme les relations ce qui s’explique facilement par l’hétérogénéité du groupe quant aux ages et aux milieux sociaux, le seul dominateur commun étant la trouille du lendemain!

 

 

   

Les maladies

Les ruptures sont assurées par des événements exceptionnels par exemple ,un jour la désinfection du camp et de ses occupants.. ! Il est en effet vite apparu que nous avions tous des " parasites " surtout en fonction de l’état des lieux. Les Allemands qui par nature sont propres ne pouvaient supporter une situation qui risque d’être : contaminent.. !
Un matin arrive un camion benne, dans lequel on nous presse de monter et en route pour les environs de Mannheim ou on nous décharge dans un vieil établissement ou sont installés des stérilisateurs horizontaux…. et , la suite est simple : tous à poil.. les vêtements dans les stérilisateurs et les bonhommes sous la douche. .et dans la tenue d’Adam attente la fin de la stérilisation..…pauvres vêtements.. ! Mais pendant que nous nous amusions( ?) ainsi une équipe des services sanitaires s’occupait du camp, outre la disparition heureuse des paillasses, elle utilisait un produit désinfectant dont l’odeur abominable nous collera au corps pendant des semaines. Mais nous n’aurons plus de poux.. !

Nous avions eu en effet un hiver très rude et dans les conditions de travail et de logement ou nous étions nos organismes avaient plus ou moins souffert du froid, des courants d’air, de l’humidité et autre.Le 7 Déc. en effet, je m’étais réveillé avec une forte douleur à la face coté gauche et une bonne température. Le chef du lager avait accepté que je reste au camp et que j’aille voir le médecin du village. Ce dernier, qui n’était plus un gamin et ne devait pas être trop du parti.. ! diagnostiqua une sinusite maxillaire et me fit aussi tôt un arrêt de travail.. ! Il me prescrivit des " rayons ? " que devait me faire son infirmière, qui elle était très jeune… ! 
J’ai noté dans mon agenda:  "curieuse infirmière que veut elle?".

Comme mon état ne s’améliorait pas malgré ses soins le bon médecin décida de m’envoyer à Heidelberg, ville universitaire toute proche, ce fut bien sur une expédition. J’y ai eu un examen radiologique qui dura trois heures à cause des alertes et d’une panne de courant.
J’ai du reprendre un peu le travail…

Le 10 janvier je refaisais une sérieuse crise de sinusite et le bon médecin décidait de me renvoyer de nouveau à Heidelberg, mais c’est seulement le 17 que je pus m’y rendre. Au vu de la radio le médecin n’hésita pas : brève anesthésie locale, ouverture du sinus par la narine, avec un trocart creux raccordé aussi tôt sur un tuyau et lavage énergique du sinus..(c’est comme si je m’y trouvais encore… !) Je ne risque pas d’oublier cet épisode car depuis, les manifestations de cette sinusite ne m’ont jamais quitté.

 

 

Les bombardements
Autre rupture : les déplacements d’utilité ou services à Mannheim , pas toujours agréables : cette grande ville est le siége d’une activité industrielle variée et capitale pour l’effort de guerre….c’est dire que l’aviation alliée le sait, les alertes quotidiennes que nous avons à Ilvesheim sont liées aux visites des bombardiers qui traitent d’ailleurs toute la région.  Les destructions sont énormes et ne concernent pas que les usines.. !
Heureusement pour la population civile les Allemands, avec la main d’œuvre importée, ont construit d’énormes abris ; le Bunker qui résistent jusqu’alors aux plus grosses bombes. Mais il faut dire aussi qu’il vaut mieux ne pas être la quand elles tombent, car les places sont réservées en priorité aux femmes et aux enfants du pays.
Nous avons été tolérés une ou deux fois dans l’entrée réservée aux étrangers...
Un bombardement crée une situation absolument affolante : le bruit assourdissant des explosions, le tremblement de la terre, le claquement des tirs de la F L A K (la D.C.A.).

 

 

 

 

   

Dans les premiers temps j’ai assisté à la désintégration d’un bombardier qui avait été touché, c’est terrible, les occupants descendaient en parachute et l’un d’eux est tombé " tous prés de nous dans un secteur ou ils restaient quelques arbres, vite dégagé de son pépin il s’est adossé à l’un d’eux et dégainant son colt a immédiatement fait feu sur les soldats qui accouraient pour le prendre, le malheureux en est mort, c’était un noir.. il savait que les Nazis , racistes, ne leur faisaient pas de quartier. Ce drame m’est resté à l’esprit sûrement aussi pour toujours.
Le 1er mars eut lieu le plus grand bombardement que la zone Mannheim-Ludwighafen ait connu : en fin de matinée l’alerte est donnée et sans discontinuer, vagues après vagues les bombardiers dans un fracas gigantesque déversement des milliers de bombes de toutes natures, incendiaires, explosives, fusantes et ce jusqu’au environ de 16 h., la fumée est telle qu’il fait quasiment nuit…Nous avons suivi cette événement d’assez loin, dans la cour de notre usine forcément arrêtée. De cela aussi je me souviens pour toujours.Les allemands avec leur opiniâtreté coutumière nous employèrent ainsi à creuser des tranchées et à construire de nouveaux abris, pourtant la situation se dégradait puisque en plus nous avions la visite fréquente des patrouilles de la chasse américaine dont les bases se rapprochaient.

     
 

 

Le mois dernier

Nous allions vers la fin de l’hiver et de notre captivité avec, bien sur, des sentiments partagés d’impatience et  de crainte.Pour ma part l’approche d’une météo plus clémente me convenait fort bien. Nous accumulions ainsi les expériences de toutes natures qui pour certaines furent très touchantes.
Ainsi un jour à la messe quant après l’élévation, j’ai repris mon livre, j’ai découvert dedans une carte d’alimentation…J’ai su quelque temps après qu’elle y avait été glissée par une personne qui allait prendre ensuite de grands risques pour nous aider. Tous ces faits se doivent d’être connus et reconnus. Car ils témoignent bien de la" réalité" de la population allemande.


Revenons à ce début mars:
L’ambiance ressemble de plus en plus à ce que nous avons connu en octobre 1944 : les Allemands perçoivent l’approche de " l’ennemi " ils savent que la contre offensive de leurs troupes dans les Ardennes a échouée.
Le 14 Mars c’est " Le Krone " qui nous apprend que les Américains ont franchi le Rhin en prenant le pont de Rémagen bien en aval de notre secteur (ce qui veut dire que, si le franchissement est réalisé aussi en amont, nous allons à un encerclement…certain..) 

 

 

 

   

Cette perspective fait monter la tension chez nos geôliers et nous vaut par exemple un contrôle du camp par la Polizei,

 

Les anciens bâtiments de l'usine MWM à Ilvesheim


Les activités de l’usine sont dérisoires et on parle de plus en plus de repli..??
Et nous retrouvons dans cette circonstance la personne qui m’avait glissé une carte d’alimentation, elle s’était manifestée discrètement par la suite et nous avait fait comprendre qu’en cas de difficultés nous pourrions - Jean Joliez et moi - nous réfugier chez elle.

 

 

 

La Libération

 

Effectivement vers le 20 mars on commence à entendre sérieusement la canonnade et les survols à basse altitude se multiplient…comme les passages de réfugiés partant vers l’Est...
Le 24 nos gardiens nous ordonnent de faire rapidement nos bagages et nous devons nous mettre en route…Nous sommes heureusement très mal encadrés, quelques réservistes…La colonne s’étire, mélangée à des civils qui partent on ne sait ou.. A un endroit encore proche du village le fossé est assez profond et nous nous y glissons discrètement…
Jean et moi nous avons gardé avec nous Maurice, un jeune que nous avions un peu pris en charge depuis notre arrivée à Ilvesheim. Après avoir observé ce qui se passait sur la route, nous sortons de notre cachette et "courageusement" nous prenons les chemins qui peuvent nous mener chez Melle Hubert. Il y a une telle pagaille que nous ne rencontrons pas difficulté, ceux que nous croisons sont trop préoccupés par les " bruits de la guerre " qui approche pour s’intéresser à nous. Notre protectrice nous accueille avec gentillesse mais sans nous cacher ses inquiétudes.. sa maison est déjà pleine…elle nous fait donc descendre directement à la cave ou nous devons être discrets au cas ou.. !
Nous passons la nuit sur le tas de charbon Dehors il a de l’agitation et…dans la maison aussi. Dans la matinée    Mlle Hubert nous apportera quelques vivres et nous incitera encore à la prudence.. : son frère , officier de S.S. est de passage.. ! La journée s’étire dans une attente anxieuse.. on entend très clairement les bruits d’une bataille toute proche et également un curieux son d’un moteur #genre tondeuse# qui va et qui vient et qui nous intrigue, ? mais…pas question de mettre le nez dehors..A la nuit, à l’occasion d’une accalmie, notre hôte nous fait monter au grenier, dans les soupentes.. Les allées et venues de son frère la préoccupent et elle pense que nous serons mieux cacher la haut….Nous sommes donc le dimanche 25 mars, anniversaire de Marie Thérèse elle a 4 ans que  deviennent-ils la bas à St. Dié ? Nous sommes dans notre grenier, sans rien voir, soumis seulement aux bruits extérieurs.

Dans la journée une très forte explosion qui fait trembler la maison nous indique qu’un des ponts sur le Neckar a du sauter… et toujours les va et vient de la "tondeuse " ??.Nous allons passer la journée et la nuit dans une ambiance lourde, la cohabitation devient difficile…La journée du lundi ressemblera à la précédente avec encore un peu plus de tension et deux nouvelles explosions qui laissent à penser que tous les ponts sont détruits nous devons être dans une île entre le Neckar et son canal latéral.. ?La nuit est relativement calme..
Tôt le matin Mlle Hubert vient nous voir, elle nous indique que les autres occupants sont partis ainsi que son frère qu’elle mème va se rendre à un Bunker puisqu’elle est infirmière et que dés que nous entendrons la sirène ,nous descendions à la cave. Nous nous exécutons. Rapidement; dehors les mitrailleuses crépitent, des grenades éclatent, la bataille est engagée…tout prés. En arrivant dans la cave nous nous apercevons que nous avons, dans la précipitation, oubliée les bougies que nous a données Melle Hubert, nous remontons donc pour, les chercher, en arrivant au premier étage nous voyons le sol couvert de gravats.. Levant les yeux nous constatons que le mur du grenier est complètement éclaté.. L’emplacement ou nous étions quelques moments plus tôt est criblé de trous…. : Une mitrailleuse lourde a pris en enfilade les parties hautes des maisons pour éliminer tout tireur qui aurait pu y être caché… Nous découvrons ainsi les techniques militaires des américains…..et le risque fatal que nous avons couru.. Bien sûr nous regagnons la cave, au plus vite, les jambes molles…

Et l’attente se poursuit, vers le début de l’après midi, les bruits du combat s’éloignent et des voix se font entendre : ennemi ou ami ? nous tendons les oreilles.. !et Jean qui a de bonnes connaissances en anglais reconnaît cette langue…nous ouvrons prudemment le soupirail et découvrons …des soldats qui ne sont plus " gris vert ".
Nous sortons de notre cachette et …sommes aussitôt mis en joue ;une fois encore il faut lever les bras… !!Jean bien sur s’efforce d’expliquer que nous sommes des French-menn, S’ils baissent leurs armes nos libérateurs restent très prudents, arrive un officier qui parle un peu notre langue, ça va beaucoup mieux. Nous indiquons que nous avons laissé nos bagages dans la cave et souhaitons les chercher. Un seul est autorisé, il me désigne ainsi qu’un soldat pour m’accompagner, ce dernier gentiment sort colt, me le met dans le dos et me fait signe de descendre dans la cave…je sors ainsi nos équipements. ! tout de méme un peu stressé. 

 

 

 

 

 

   

 

 

Les américains nous emmènent avec eux...

Nous sommes LIBRES. 

 

Les yeux ébahis nous découvrons l’armée américaines en campagne et en premier lieu la fameuse " tondeuse " dont le bruit nous avait intrigués….. : c’est le Piper d’observation, avion à ailes hautes, équipé d’un moteur ultra léger et qui se pose n’importe ou . C’est l’auxiliaire très précieux des troupes au sol, nous en aurons très rapidement la démonstration. Des rafales d’armes automatiques crépitent encore ici et la et nos libérateurs nous conduisent avec eux à l’abri. A notre stupéfaction nous observons que quasiment toutes les maisons sont ornées de.. drapeaux blancs confectionnés avec tout ce que les occupants avaient sous la main...Signe de la rédition !!!A l’école ou nous sommes conduits, nous retrouvons d’autres Déodatiens et nous nous installons tous dans la cave ou nous passerons la nuit sur des civières.. ( C ‘est plus confortable qu’un tas de charbon..) nous dormirons mal et peu ; J’ai écrit dans mon agenda : " on ne peut réaliser notre Liberté.. ".    
Nous sommes toujours dans la zone des opérations et dans la matinée nous voyons les Américains se déployer pour poursuivre leur progression, ce qu’ils font avec une grande minutie, tout à coup on entend un départ, le sifflement de l’obus et son éclatement, de loin nous apercevons qu’un soldat a été touché, aussitôt tous se replient.. Et c’est le silence soudain troublé par le ronronnement de la " tondeuse " Le piper apparaît, fait un tour au-dessus de nous et repart.. Quelques minutes après ce sont des obus qui passent et vont anéantir un canon allemand de 88 qui avait eu la malencontreuse idée de tirer sur le village..
Cet épisode passé nos libérateurs poursuivirent leur progression sans rencontrer apparemment beaucoup de résistance et nous découvrions alors avec ébahissement le " le gros " de l’armée avec ses jeeps, ses dodges, ses GMC, ses bulldozers et autres engins, avec les réserves de chars, auto mitrailleuses etc.. Inimaginable, pour nous qui avons encore à l’esprit l’équipement apparent de nos troupes en 1940. Bref nous étions en 1945 et, enfin libres ou presque.Et tout d’un coup nous éprouvons un sentiment d’isolement.. nos geôliers ont disparus ,les habitants se terrent, les unités américaines poursuivent leur avance et n’ont laissé que de faibles éléments de surveillance qui ont peu de préoccupations pour tous les " étrangers " qui apparaissent on ne sait d’ou !.Enfin les :Allemands se manifestent : prudemment…puis chaleureusement et en cette soirée du vendredi saint.. Nous coucherons dans des lits avec des draps et si nous passerons à l’église pour remercier le ciel, je ne crois pas que nous ayons fait " maigre "... !
Les habitants se montrent soudain bavards avec les Français.. par contre ils ont (surtout les femmes..)une peur épouvantable des " Schwarze ".Les noirs américains ont en effet une réputation de violeur inculquée par le racisme nazi.Aucun allemand n’a été nazi.. bien sur ! la preuve ils vont se précipiter dans les locaux du parti , vont tout y saccager et piller. Ce qui nous surprend quand mème un peu pour ce peuple si habituellement discipliné.. ! Nous nous contenterons de quelques insignes souvenirs et pour ma part d’un " Mein Kampf " officiel dédicacé,, selon l’usage à de jeunes mariés qui d’évidence l’avait abandonné.. ! Ce document qui est vraiment une pièce d’histoire a été ,hélas, en partie détériorée par une fuite d’eau dans le grenier de la rue Bernier à Angers en 1980.
Le 31 Mars nous profitons de notre liberté et de l’éloignement des combats pour explorer notre " île ",visiter notre ancienne usine :la Motoren Werk abandonnée, voir les ponts anéantis et ceux qui les remplacent déjà du type " Belley " . Surtout nous retrouvons Melle Hubert, l’infirmière si courageuse, à laquelle nous devons tant.
Nous sommes impatients de savoir ce qui se passe à St Dié et d’y retourner. Le jour de Pâques, 1er avril, j’ai écrit dans mon agenda : " messe pascale, hélas pas en famille, c’est dur.. "Comme souvent quand on est confronté à des situations difficiles on se bat avec détermination, et puis, le risque parti on reste soudainement désemparé, c’était mon cas.  Ma foi et mes convictions m’avaient aidé à faire face positivement, à soutenir mes deux copains de misère et d’un coup c’était le vide..! Mais en ce dimanche de fête, la sérénité revint vite : Jean était allé consulter les autorités militaires U.S. et avait appris que nous devions être transférés le lendemain. Alors chez le " Krone " ce fut une dernière rencontre qui fut t rès arrosée et qui se termina fort tard… (prémisse de la réconciliation ??)